Si vous me suivez depuis un petit temps, vous savez peut-être que je ne viens pas du Québec. Mon père était Belge, ma mère est Péruvienne… et je suis née à Lima, au Pérou. Aujourd’hui, je me considère Québécoise parce que j’ai passé 33 ans de ma vie à Montréal, mais mes racines péruviennes sont très fortes. Le Pérou, c’est mon pays, mes ancêtres, mais c’est avant tout ma grand-mère et ma mère, les deux femmes les plus fortes que j’ai eu la chance de connaître.
C’est parce que je suis consciente de cette force et des sacrifices qu’elles ont faits pour que je me réalise, que j’étais si fière que la Chambre de commerce Latino-américaine du Québec m’ait choisie comme un des 20 talents de la communauté qui ont su se tailler une place dans notre belle province. En plus de paraître dans leur premier magazine, j’ai eu l’opportunité de raconter mon parcours et partager ce que représentaient mes racines latino-américaines lors d’une soirée célébrant la journée internationale de la femme, en mars dernier.
En écoutant les autres femmes prendre la parole, j’ai réalisé qu’il y avait une différence majeure entre leurs parcours et le mien. Elles avaient toutes fait le choix de quitter leur pays et de laisser derrière familles et amis. Une fois arrivées ici, elles ont dû travailler très fort pour s’intégrer à la société québécoise et constamment prouver l’équivalence de leurs compétences… car on sait qu’il est toujours plus difficile d’obtenir un emploi ou de belles opportunités lorsqu’on est issus de l’immigration, surtout quand cette dernière est visible (et audible). Toutes ces difficultés, c’est ma mère qui les a vécues pour nous. Je sais qu’elle a été victime de discrimination plusieurs fois dans sa vie et j’en ai même été témoin lors d’une convocation à la cour pour un logement qu’elle n’avait pas obtenu. En sortant de cette rencontre, durant laquelle j’avais réussi à garder mon calme pour la soutenir, j’avais les larmes aux yeux et la rage au ventre. Cette journée-là, j’ai compris que les difficultés financières n’avaient peut-être pas été le plus difficile pour elle. J’ai aussi réalisé ma chance d’être arrivée ici aussi jeune… oui j’avais eu à apprendre une autre langue, mais à 5 ans, c’est facile!
J’ai appris le français aussi facilement que je me suis intégrée à la société québécoise, et je n’ai jamais ressenti le regard de la différence ou de la discrimination quant à mes origines. C’est ce que j’ai raconté une fois que c’était mon tour de prendre la parole lors de la soirée de réseautage.
Dans son poème « Our grandmothers », Maya Angelou écrit « I come as one, but I stand as 10,000 ». Cette ligne me touche beaucoup car elle illustre exactement ce que je ressens. Ma mère a pavé le chemin pour que je puisse avoir les opportunités que j’ai, en immigrant au Québec, mais c’est ma grand-mère qui a ouvert cette voie, en la laissant voyager à travers le monde et en lui transmettant sa force. Je peux évidemment continuer ainsi et remonter jusqu’à mes ancêtres incas.
Vous comprenez maintenant pourquoi je suis aussi fière de me retrouver dans ce magazine. Pas juste parce que ça me fait un petit velours d’être reconnue pour mon parcours, mais surtout pour ma maman, ma grand-mère et sa grand-mère, qui sont à la source de cette reconnaissance. Ça fait quelques années que je veux retourner au Pérou pour écrire sur mon pays, particulièrement sur les artisans du textile et les designers de mode, mais là c’est décidé! Je vais aller, non seulement au Pérou, mais aussi dans d’autres pays d’Amérique du Sud pour mettre de l’avant l’industrie de la mode. C’est de cette façon que je veux célébrer mes racines latino-américaines.
Avant de vous laisser avec quelques autres images de mon shooting avec LOC & MAC pour le magazine, je veux proposer une idée à la CCLAQ pour la prochaine édition du magazine… pourquoi ne pas souligner les parents qui ont tout quitté pour que leurs enfants aient une meilleure vie au Québec? Il me semble que ça serait magnifique comme dossier!
Lolitta xx