Considéré comme une des forces explosives de l’art contemporain à l’échelle internationale, l’artiste montréalais David Altmejd revient chez lui pour une exposition à voir absolument au Musée d’art contemporain, jusqu’au 13 septembre 2015.
Sarah Altmejd, 2003
Son art peut s’avérer déstabilisant, comme ici avec la tête de sa soeur, l’être qu’il aime le plus au monde, et le trou d’une insondable profondeur à la place du visage. Il s’agit de l’une de ses toutes premières oeuvres, et il a choisi d’ouvrir l’exposition avec elle. Il en parle davantage, comme de plusieurs autres oeuvres, sur le microsite créé exprès pour l’occasion. Je vous encourage à visiter flux.macm.org; vous pourrez y entendre les commentaires d’Altmejd pendant que vous visitez les salles. Ça vaut la peine de bien charger la pile de votre téléphone intelligent avant d’aller visiter l’expo, car l’artiste vous y expliquera ce qui entoure son processus de création, ses inspirations, des anecdotes, etc.
The Island, 2011
Mais ne cherchez pas une analyse précise du message de chaque oeuvre. Et ce même si vous écoutez le sculpteur qui les a lui-même façonnées. Souvent, il n’y a pas de message unique et en conférence de presse, David Altmejd avait un message encore plus important pour tous ceux que l’art contemporain peut intimider: « ne soyez pas sur la défensive lorsque vous approchez une oeuvre. Une oeuvre d’art peut communiquer une infinité de messages différents et pas un seul. Ayez confiance en votre jugement. Laissez-vous fasciner par la complexité des choses et j’espère que vous serez capable de voir de la beauté dans cette complexité ».
Bodybuilders, 2011. Un corps fascinant qui occupe l’espace en se construisant lui-même. Il aime l’idée que ses mains contiennent une intelligence.
Le bodybuilder devant « Le trou », oeuvre créée spécialement pour le MAC et reflétant parfaitement la flexibilité du musée montréalais. De plus vieux musées moins flexibles le poussent parfois à faire des expositions plus linéaires et contraignent les visiteurs à des contemplations moins optimales. À Montréal, Altmejd nous présente « l’expo idéale », comme il la perçoit, avec des salles plus sombres, plus horizontales, suivies de ses pièces où la verticalité est frappante (vous verrez, avec ses géants).
Dans The Flux and the Puddle, l’oeuvre la plus importante de l’exposition et de sa carrière, il est surtout préoccupé par le mouvement, les cycles. Il y voit un bon résumé de sa carrière.
En effet, comme plusieurs de ses pièces, celle-ci contient du fil, du verre, des paillettes, des noix de coco, des cheveux et autres matières organiques… tout cela, à ses yeux, vibre d’énergie, de mouvement. Il y a du miroir fracassé, aussi. Et il nous expliquait pendant notre visite guidée privilégiée, que « le miroir prend vie quand il est fracassé. Il ne s’agit pas d’une destruction mais bien d’une naissance. Sinon, on ne regarde pas un miroir. On regarde seulement ce qu’il reflète. Le coup de marteau lui donne une âme!
La sculpture a un pouvoir extraordinaire, selon David Altmejd, en ce que l’objet créé a un volume fini, mais contient bien souvent un espace infini. Exactement comme le corps limité de l’homme et l’esprit ou les sentiments infiniment puissants qu’il renferme et qui génèrent son sens.
Puissant et profond, comme cette exposition, que je m’empresse à nouveau de vous recommander.
On s’y croisera peut-être car j’y retournerai quelques fois au cours de l’été… c’est à ce point.
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Jonathan